Et voilà, 12 mars 20, nous sommes de retour en Thaïlande, cette fois pour découvrir la partie nord du pays. Nous arrivons dans les périodes les plus chaudes, mais dans les montagnes, ça devrait être plus frais normalement. Pourvu que l’on ne croise pas Coronavirus, pas envie de le voir, celui-là. Il va pourtant avoir un impact fort sur notre voyage, vous allez voir.
Frontière Thaï
Malgré le coronavirus, le passage de la frontière fut d’une facilité déconcertante. C’était juste un peu le souk, dû essentiellement au changement de sens de circulation.
Nous avons eu quelques questions et un contrôle de température côté Birman, et de ce côté, rien. Un formulaire, une adresse à donner, prise de photo et empreintes et circulez, y’a rien à voir. Bon, tant mieux. Depuis hier, Jacques qui n’arrêtait pas de regarder sur les sites officiels les changements de modalités de passage de frontière à cause du virus, commençait à être inquiet pour le passage de la frontière et effectivement, nous sommes passés juste quelques jours avant la mise en quarantaine systématique des étrangers en Thaïlande.
Nous arrivons donc au niveau de Mae Sot. Le changement est radical : des grandes routes, conduite à gauche, plus de gros « crachouilloux » rouges partout par terre, ni de gens qui crachent. Donc, c’est plus propre, les espaces sont cultivés, c’est plus calme aussi, plus vide, moins d’enfants … Jacques ayant besoin de pédaler, nous continuons donc notre route. Direction le nord. Cette route longe la rivière Moei, frontière avec la Birmanie. Arrêt à Mae Ramât. Petite étape de 45km. Il fait vraiment très chaud.
La journée qui suit sera mouvementée. On part à la fraîche, comprenez, il fait seulement 20°, petites montagnes, monte-descend, on n’a pas eu de petit dej ce matin, et on trouve rien sur la route, on a juste perdu l’habitude de faire des réserves, oups… Je pédale au ralenti.
Tous les bords des routes sont brûlés : feu de forêt ou brulis ??? On ne sait pas.
On traverse un endroit où est installé un camp de réfugiés birmans . C’est immense au moins 2 ou 3 km de long. C’est quasiment une ville, on y voit des écoles, des magasins,des volailles…. Ce camp, fermé et gardienné, existe depuis plus de 20 ans.
Camp de réfugiés
Nous en croisons tous les 5 ou 10 km et les policiers sont à côté, souvent le nez sur leur portable mais parfois, en poste, mitraillette au poignet.Brrr
Il y a énormément de militaires armés dans le secteur ainsi que des barrages checkpoint sur les routes. Certains paient quelque chose, on ne nous demande rien.
À mi parcours, enfin un petit magasin. On englouti un petit pain brioché et un coca. On s’apprête à partir, Mais Jacques trouve que sa sacoche est bien vide… Mince, on a oublié nos chargeurs de téléphone à l’hôtel ce matin. M….! Oh les nuls, y’a plus qu’à y retourner. Pas envie de se retaper le dénivelé… uns solution : Bon, allez Jacques prend un taxi-bus et fait l’aller retour.
Notre Jacko dans la bétaillère. Est ce que le conducteur a bien compris la destination ?
J’attends avec les vélos, observant toutes les allées et venues dans le camp, les mouvements des uns et des autres sur la route… Tout ce monde qui s’agite. moi, j’attends. Surprenant, non?
Et le voilà qui revient 1h15 après, avec les précieux chargeurs, on peut repartir, mais sous la chaleur… Il doit bien faire 40°.
Maison au toit de feuilles séchées
Nous trouvons rapidement un p’tit restau… Ouf, On avait faim. Et là, la serveuse nous pose nos assiettes à 1m de nous et les pousse à peine. Un peu plus tard, dans un village, une femme à moto nous arrête. Je vais vers elle, elle tend son bras et sa main pour dire stop ! . Elle écrit sur son téléphone dans un anglais approximatif un message relatif au coronavirus, d’utiliser du gel hydroalcoolique… Bla bla, et me tend le téléphone à bout de bras, la main tremblante en détournant sa tête. Cet acte de rejet m’inquiète pour la suite des événements. Nous sommes en contact avec les amis en France et les news ne sont vraiment pas réjouissantes là- bas… Bazar mondial, on dirait.
Montagnes sous la brume
Continuons, on verra bien !
Oooooh ça penche !
Nous arrivons à Ban Mai, le lendemain à Ban Tha Song Yang, puis à Ban Mae kha Tuan, ça ne vous parle pas trop tout ça, mais c’est pour André qui dessine les trajets (coucou André).
Elle est pas belle la vie ?
Nous trouvons de jolis petits bungalows pour la nuit, et il n’y a personne, quel calme !
Faut vraiment être à vélo pour s’arrêter dans des endroits pareils. Et franchement, c’est top !
Nous attaquons les montagnes. Ambiance de brume et extrêmement sec. C’est brûlé partout, d’ailleurs parfois, ça se consume quand nous passons ce qui nous apporte une source de chaleur supplémentaire, presque irrespirable. Il doit faire plus de 50 degrés. Le problème, c’est que ça brûle sans arrêt, nuit y compris, on voit les feux ça et là. Des milliers et des milliers d’ha en proie aux flammes. Une forêt en bien triste état. Plus un seul jeune arbre pour le renouvellement. Aïe aïe la planète.
Au feu les pompiers, la forêt brûle !!
On n’a jamais vu un camion de pompier, ni personne s’occuper des feux. Tristesse. Un après-midi nous passons près d’une rivière… Super, on fait trempette des pieds
Oups, que c’est dur, on avait prévu 70 km aujourd’hui. Trop ambitieux. Le problème, c’est la verticalité des pentes. D’ailleurs, on ne voit aucun camion ou autobus ici, seulement des 4×4 et des pickup!
Pied à terre, les pentes sont si difficiles. Dommage , la route est belle.
Heureusement, lors de notre pose déjeuner (en 4h, nous n’avions avancé que de 20km) un gentil monsieur, voyant la chaleur et comment nous nous jetons sur l’eau fraîche, nous propose de nous emmener en voiture. Si gentiment proposé, Cool, on accepte bien sûr. Nous ferons 20 km à l’arrière de son pickup.
Et nous voilà, avec nos p’tits vélos à l’arrière du pick-up, c’est bien aussi le vélo-pickup
Du coup que 50 km dans la journée, 1452m de dénivelé sur nos vélos , on est raide mort . Heureusement on trouve ce soir encore un joli p’tit bungalow.
Basique et suffisant : une pièce, un matelas au sol, un ventilo et une moustiquaire. À côté une pièce avec un WC et un bidon d’eau pour la douche
Les deux journées de vélo qui suivent seront courtes, on ne va pas se tuer quand même. Pis, on a le temps, nous ne voulons pas prendre un avion trop tôt pour le Khazastan, il y fait froid. Bon, cela dit, avec le coronavirus, si ça continue, on pourra aller nulle part. Pfff… essayons de ne pas y penser, 30 km pour aller à Mae Sariang, le long d’une rivière. C’est vert, cultivé : ail et maïs (cf les champs de Thaïlande suite).
En dehors des villes, beaucoup de déchets sur les bords des routes.
On arrive tranquilou le midi. Il devrait y avoir plein de touristes, normalement. On en voit 2, c’est très étrange….repos au frais, il fait si chaud.
Puis 50 km monte-descend, pour aller à Ban Mae la luang. Ce matin, lors d’un arrêt boisson, la police est venue nous voir, elle voulait savoir depuis combien de temps nous étions en Thaïlande, où on était avant… Ils nous informent que la frontière avec la Malaisie est fermée et que Bangkok aussi, lieux touristiques fermés, bars,…etc.
Oups, mais on voulait s’y rendre pour prendre un avion. Finalement, ils ne savent pas trop, ils nous conseillent de bien suivre ce qui se passe sur internet… Nous trouvons, enfin plutôt on nous emmène avec gentillesse vers une guesthouse en début d’après midi, ça ira très bien. Avec cette chaleur (40 °) il vaut mieux y aller doucement. On a de la chance, dans cette partie de pays touristique, il y a des hébergements tous les 20 ou 30km. Facile pour nous.
J’ai regardé sur internet, à Bangkok, certains lieux touristiques, bars sont effectivement fermés. La Thaïlande se ferme petit à petit.
Nous suivons bien entendu les informations à propos du Coronavirus. De pire en pire, toutes les frontières du monde entier se ferment… Les voyageurs français sont invités à rentrer en France tant qu’il y a des vols. Ces derniers s’annulent de plus en plus… C’est la panique partout. Rentrer ou ne pas rentrer, telle est la question. C’est de plus en plus anxiogène… On passe beaucoup de temps sur internet à chercher les infos.
En attendant de prendre une décision, on avance tout doucement. La Région est très montagneuse, mais comme ça brûle de partout, c’est un peu un spectacle de désolation, heureusement quand nous nous rapprochons d’une rivière, c’est plus vert, ça bosse dur dans les champs.
Bel abri, non ??
Nous arrivons a Khun yuam. Nous sentons qu’à l’hôtel où nous nous présentons, la dame est inquiète, nous demande d’où on vient, est-ce qu’on a eu des tests sur la route… Ça devient vraiment inquiétant. Il n’y a personne… Brrrr !
Petite pause glacée en haut d’une super-côte
Le lendemain nous arrivons à Mae Hong son, jolie petite ville calme et paisible, un petit lac. Nous décidons de nous arrêter une journée. La tête préoccupée par toutes les nouvelles de France et de Thaïlande, les compagnies annoncent l’arrêt des lignes aériennes pour la fin du mois, le gouvernement appelle les français en voyage à rentrer dès que possible. Tous les pays où nous devions aller ont fermé leurs frontières, cette fois c’est certain. La mort dans l’âme, nous décidons de rentrer. Notre Christine, pro du voyage et des situations d’urgence y travaille d’arrache-pied, elle sera en contact au quotidien avec nous pour nous trouver une solution. De notre côté nous trouvons un moyen pour aller le plus vite possible à Bangkok, pour être prêts.
En attendant nous essayons de garder le moral et de profiter de ce que nous offre cet endroit.
Mangues et bananes
Rôti : petite galette à la banane… Tu te rappelles Laetitia ??
Petite grimpette sur la colline pour visiter un temple
Temple au bord du petit lac
Voilà nous partons en bus, 16h de bus pour rejoindre Bangkok.
on garde le sourire mais c’est dur…
Arrivée masquée à Bangkok, ce sera les derniers km que nous ferons avec nos p’tits vélos
Si c’est pas malheureux de finir ce voyage dans un carton !!
Nous trouvons un magasin vélo pour emballer nos compagnons de voyage, ils vont nous manquer, terriblement
Vélo sur tuk tuk direction l’hôtel, on leur avait pas fait ça encore, les pauv’
On ne réalise pas encore. Notre dernier jour a Bangkok sera d’une tristesse absolue, on ne veut pas aller dans des endroits touristiques, on marche un peu et on attend, on prépare notre départ, réserver un taxi… on cherche des p’tits restau mais, le soir, on ne trouve que des plats à emporter, on ne dégustera pas non plus la bonne cuisine thaï. On en profite pour finir nos quelques réserves, histoire d’alléger nos sacs. Nous savons que nous allons être en limite de poids. 23kg pour le vélo et 23kg pour les bagages en soute.
On a vu juste, le vélo de Jacques, emballé, pèse 22,7 kg et le mien 21 kg. Les bagages de Jacques pèsent 22kg et 18kg pour les miens. Ça passe, ouf !
Même si, on se dit qu’on en a bien profité, même si on se dit qu’on repartira, même s’il y a bien pire dans la vie que juste arrêter un voyage… L’émotion de tristesse nous envahit.
Difficile de trouver une fin d’article très gaie. À cet instant, nous sommes arrivés en France, nous avons passé la nuit en zone en transit, car nous devons attendre notre correspondance pour Lyon. Nous trouvons un endroit calme pour la nuit, pas trop de courants d’air, moquette, j’avais emporté un matelas de bivouac. Nous ne sommes pas les seuls. Chaque petit recoin est utilisé comme abris par des voyageurs en transit. Vision étonnante d’un grand aéroport Parisien. C’est pas le moment d’aller discuter, chacun doit respecter les distances de sécurité autant que possible. La police fait des rondes, tout le monde est calme. Certains hôtels sont fermés et d’autres, nous dit-on ont été pris d’assaut. Bivouac à Roissy, pas banal, ça !!
Notre lit sur moquette à Roissy /France
Au dessus de ma tête, des affiches relatives aux épidemies, covid 19, mais pas que !! C’est pas une ambiance de fête à Roissy.
Dans la nuit, on nous a déposé une bouteille d’eau, un monsieur nous a aussi donné un sandwich hier soir et un ce matin Il en avait assez pour lui, c’est sympa, non?? Le personnel de l’aéroport fait ce qu’il peut pour orienter le plus gentiment possible… C’est rassurant quand même….
Voilà, reste plus qu’à voler pour Lyon, récupérer ma p’tite voiture, et regagner nos montagnes, trouver un logement car le nôtre est occupé. Ça s’organise.
désert…ambiance militaire
Pas de fête de retour pour le moment, donc, certains avaient prévus de nous retrouver sur la route pour rentrer avec nous… On n’annule pas, on reporte. L’idée étant de repartir dès que ce sera possible, à programmer en fonction de la météo. À nous de réfléchir sur l’endroit où nous redémarrerons le voyage. . Du travail agréable en perspective !
En tout cas, j’adresse un dernier gros merci à Christine pour nous avoir trouvé une solution de retour et un grand merci à tous ceux qui nous ont suivis, écrits, accueillis, accompagnés tout au long de ces 10 mois et demi d’aventure. et 15059 km parcourus.
15059 km parcourus en 10,5 mois et des millions de sourires reçus sur nos vélos.
Maintenant, Hauts les cœurs pour cette période de confinement mondial. Nous allons avoir un monde à reconstruire…