RUSSIE Champs : 25 jours – 930 km – Aout 2019

    Les Champs de Russie

Vous avez dit champ !

Pour le moment entre la frontière Estonienne et St Petersbourg, seulement 150km en vélo pour apprécier l’agriculture de Russie mais déjà beaucoup de terres incultes. En effet, seuls 10% des terrains du pays sont cultivés. La faible fertilité des sols et le climat trop froid ou la chaleur excessive en sont la principale cause ainsi que le manque de moyen financier. Nous sommes au nord ce qui explique qu’ici seul l’élevage est possible. Nous voyons de grandes étendues de prairies permanentes composées uniquement de dactyle (une graminée) qui doivent être ensilés pour nourrir des vaches laitières.

un tout petit campement dans une prairie de dactyle de plus de 100 ha

 Il semblerait que nous soyons sur le même fonctionnement d’exploitation que dans les Pays Baltes, mais à une autre échelle. La répartition est de :

  • 50% sous forme collective avec une surface moyenne de 8000 ha ,
  • 35% en lopin de quelques ha voir
  • et de 15 % en privé de quelques centaines d’ha. Mais aussi une entreprise internationale qui exploiterait, tenez-vous bien : 350 000

En prenant le train entre St Pétersbourg et Moscou, Je pensais apercevoir un peu les cultures et bien c’est loupé. De la forêt encore de la forêt et toujours de la forêt sur presque 700 km.

Allez, montons donc dans le transsibérien pour apercevoir dame nature. Et bien ce que je craignais arrive : encore et toujours des forêts de résineux mais aussi de magnifiques étendues de bouleaux sur des milliers de km entrecoupés par d’immenses étendues de marécages et de joncs. Seulement autour des petits villages : quelques lopins de prairie souvent fauchés un peu tous les jours à l’aide de débroussailleuse. Le foin est mis sous forme de petites meules dehors comme nos grands parents le pratiquaient jadis. Bref, encore une fois, une agriculture vivrière ou plutôt de subsistance au regard de la misère que l’on peut observer. Si je ne me trompe pas, ces paysages forment ce que l’on nomme la Taïga.

 

marécage joncs, le royaume des moustiques

 Seulement sur les derniers 500 km avant d’arriver à Irkoutsk, le paysage est devenu plus vallonné. La forêt est entrecoupée : soit de très grandes étendues de pâturage dans les pentes, soit, sur les terrains accessibles aux machines, des céréales bien chétives.

L’exploitation de la forêt est bien présente même si, semble-t-il beaucoup de surfaces ne soient pas entretenues. Nous avons pu observer de très grosses scieries tout le long du parcours de la voie ferrée desservie par les trains pour le transport du bois soit en grumes soit débité.

Le tout à la Russe: c’est à dire pas entretenu, délabré, et d’une autre époque, mais qui continu malgré tout à fonctionner. Bien sûr, il ne faut pas oublier que nous sommes en plein cœur de la Sibérie, la nature ne permet pas à l’homme sans doute d’agir comme il le souhaiterait. Les hivers très froids et longs laissent peu de temps pour travailler dans de bonnes conditions. Sur les grands chantiers, les entreprises fonctionnent tous les jours de la semaine.

Quelques km nous séparent encore de la Mongolie nous verrons bien si les paysages changent.

Nous voici de nouveau sur nos biclous à l assaut des montagnes Russes. Nous sommes obligés de contourner le lac Baïkal et nous apercevons très vite que les Russes attaquent le relief de face. Pas de lacets, on passe d’un torrent au sommet d’une colline avec des pentes à 10, 12, ou 14 % (nos mollets en prennent un coup) le tout, dans d’immenses forêts ou la cueillette de baies et de champignons bat son plein. En général, ils vous attendent, assis sur une chaise au sommet pour vous vendre leurs récoltes : des pleins seaux de chanterelles, de sanguins, myrtilles etc.

Vous avez sans doute compris que l’agriculture a pris ici une autre forme…

Après une descente à tombeaux ouverts avec nos bolides sur une superbe route de 10km avec une pente d’au moins 10%. J’avais pourtant promis de me retenir mais comment résister, nous doublons les camions qui descendent doucement en laissant derrière eux une odeurs de freins. Ils sont bien sur tous en surcharge, écrasés par leurs fardeaux, et certains dans des états de décomposition un peu avancée.

Nous plongeons littéralement sur « le Baikal » comme ils le nomment, un des plus grands lacs de la planète. Un immense réservoir d’eau douce la plus propre du monde. Elle est effectivement très translucide. De partout en Russie, on parle de ce lieu emblématique.

Imaginez un peu une profondeur max de 1700 m ,750m de moyenne, 636 km de long et une largeur variant de 24 km à 80 km. Un Bordelais l’a traversé en vélo dans le sens de la longueur, l’hiver bien sûr sur la glace qui a une épaisseur de 1,5 m.

Les voitures l’empruntent aussi.

le début du lac Baïkal

Depuis maintenant 3 jours, nous pédalons sur la route qui le borde, nous pouvons assister une fois de plus à un spectacle des plus surprenants. Comme dans beaucoup de lacs, la pêche est présente, mais ici ils sont très forts. c’est du direct pêcheur-consomateur. Tout le long de la route, ils font griller les poissons dans des barbecues !!! .Enfin des tonneaux de 200 litres dans lesquels ils font un feu de bois pour faire cuire ce fameux Omoul, un poisson aussi bon que le saumon. Nous sommes sur la route principale qui va à Vladivostok (ville de l’extrême Est de la Russie) à quelques 3000km de là où nous sommes, tout le monde s’arrête pour faire des réserves.

cuisson du poisson à la mode Russe

 Encore un jour le long du lac et nous attaquerons les montagnes de Bouriatie (partie Mongole de la Russie) qui devraient nous réserver bien des surprises j’en suis sûr, au regard de ce que nous découvrons en avançant dans ce que j’appellerai la Russie profonde…

Aujourd’hui surprise ! Nous arrivons dans un delta formé par un fleuve et tout de suite le paysage change. D’abord d’immenses champs d’avoine encore vertes, puis de magnifiques (hum) champs de blé. Je suis allé voir pour être sûr. Ils vont bien mettre une journée pour remplir un camion. Pourtant, le champ doit faire plusieurs centaines d’ha.

Une fois de plus, nous avons la confirmation que plusieurs types d’exploitation cohabitent. Regardez un peu.

un tracteur d’une autre époque

 

 

 

 

 

 

Une meule de foin pour l’hiver

 

 

 

Un troupeau de 500 vaches gardées par un cavalier

 

 

 

 

La route se poursuit et nous voici dans un autre monde. Encore de la forêt sur les versants nord. Mais surtout l’arrivée de la fameuse steppe à perte de vue avec des troupeaux de vaches en totale liberté.

la steppe

 Malgré tout, les paysages sont verts, l’eau n’est jamais très loin avec encore de nombreuses zones de marécages dans d’immenses cuvettes ou serpentent des cours d’eau toujours pâturés par des vaches et leurs veaux. Nous croisons aussi un cavalier gardant un troupeau de mouton qui est venu faire un tour dans le marais. L’originalité si je peux dire et qu’il porte une moustiquaire sur la tête pour de protéger des moustiques. Bon allez, Cathy va dire que je suis un peu traumatisé par ces bestioles. J’ai de quoi l’être : à chaque arrêt, j’ai droit à ma petite prise de sang de ce volatile qui m’adore.

Cathy regarde au loin la route qui nous attend

 En avançant vers le Sud Est, le relief est plus marqué, nous prenons progressivement de l’altitude au milieu des pâturages, les villages deviennent de plus en plus distants. Du sommet du col où nous bivouaquons, à 1100 m d’habitude nous avons à perte de vue de la steppe que nous allons traverser et nous rendre compte que la végétation change. Les moutons remplacent maintenant les vaches. Les sols sont de plus en plus sableux et l’herbe plus maigre. Le vent transporte du sable qui se dépose sur les routes.

Nous sommes arrivés ce soir à la frontière avec la Mongolie en laissant derrière nous un peuple adorable, très accueillant, avec un cœur énorme. Ils nous klaxonnent pour nous encourager, nous saluer, ils nous serrent la main en signe d’amitié. Il faut dire qu’ils ne voient pas beaucoup de voyageurs comme nous et les surprenons un peu. Ils me demandent tous mon âge.

Une autre aventure commence avec la Mongolie nous allons reculer sans doute encore un peu dans le temps ou peut être plutôt découvrir une autre façon de voir la vie avec les nomades… affaire à suivre si vous êtes d’accord.